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NAO agences de voyages : les syndicats iront-ils jusqu'à saisir le Ministère ? 🔑

Faute d'accord sur les salaires, doit-on s'attendre au retour d'une commission mixte paritaire ?


Ils sont le nerf de la guerre et pourtant le nerf semble pincé ! Alors que les organisations patronales et syndicales ont rouvert les négociations autour des salaires minima des agences de voyages, le semi-échec des précédentes NAO flotte encore dans l'air... Tandis que chaque partie défend ses intérêts et campe sur ses positions, cette situation pourrait inciter les syndicats à saisir les autorités compétentes afin de passer la commission paritaire en mode « mixte » et permettre un déblocage via une plus forte intervention de l’État. Une « mise sous tutelle » sera-t-elle nécessaire ? Éléments de réponse.


Rédigé par le Vendredi 26 Mai 2023

Face aux divergences entre organisations syndicales et patronales, la réouverture des NAO n'aura duré que dix minutes lors de la dernière réunion de la commission paritaire - DR : DepositPhotos.com, billiondigital
Face aux divergences entre organisations syndicales et patronales, la réouverture des NAO n'aura duré que dix minutes lors de la dernière réunion de la commission paritaire - DR : DepositPhotos.com, billiondigital
Ils sont venus plein d'espoirs... douchés en quelques minutes !

Le 17 mai dernier se tenait, comme chaque mois, la Commission Paritaire Permanente de Négociation et d’Interprétation (CPPNI), réunissant autour d'une même table les organisations patronales (EDV et SETO) et syndicales (CFDT, CFTC, SNEPAT-FO, CGT et CFE-CGC), représentatives de la profession.

A l'ordre du jour figuraient notamment les négociations annuelles obligatoires (NAO).

En effet, malgré un accord approuvé le 5 avril dernier, les salaires minima des catégories A et B de la convention collective des agences de voyages sont, depuis le 1er mai 2023, à nouveau passés en-dessous du SMIC.

Lire aussi : Débat sur les salaires minima : l'arbre qui cache la forêt ? 🔑

Sans répit aucun pour les partenaires sociaux, il a donc fallu remettre le sujet sur la table. Sauf que le choix des syndicats d'opter pour la proposition la plus conventionnelle lors de la précédente NAO (avec une augmentation des minima limitée à 6% pour les groupes A, B et C et à 1,88% pour les groupes D, E, F et G) était, semble-t-il, toujours dans les esprits...

« A l'avenir, quand nous aurons des réunions de NAO, nous nous contenterons de faire ce qui a toujours été fait, nous discuterons des minima conventionnels » avait déclaré début mai dans nos colonnes, Morgan Butty, le président de la Commission Paritaire Permanente de Négociation et d’Interprétation.

Et c'est visiblement ce qu'il s'est passé. « Lors de la réunion de la CPPNI du 17 mai, nous avons demandé aux organisations d'exprimer leurs revendications, lorsqu'elles étaient en mesure de nous les présenter. En retour nous avons fait part de notre proposition d'évolution des groupes A et B pour leur mise en conformité », nous confirme Morgan Butty.


« La partie patronale refuse de négocier »

Dans les faits, cela se traduit du côté des EDV et du SETO, par une proposition d'alignement du salaire minimum sur le SMIC pour la catégorie A et par le positionnement de celui du Groupe B à 0,97% au-dessus du A.

Du côté des syndicats, qui anticipent d'éventuelles revalorisations du SMIC en juillet et en septembre compte tenu de l'inflation, les propositions d'augmentation sont comprises en moyenne entre 3,5 et 4% par rapport au SMIC pour les groupes A et B.

Certaines organisations ont également rappelé l'importance de maintenir les écarts de salaires entre les différentes catégories afin de stopper le tassement de la grille.

Lire à ce sujet : Salaires tourisme : vers des déséquilibres entre "nouveaux" et "anciens" salariés ? 🔑

Malgré ces demandes, « nous avons été pris de court, commente Thierry Dronet, représentant du syndicat SNEPAT-FO. Nous ne nous attendions pas à entendre une telle proposition, qui remet le niveau A au SMIC et le niveau B à 0,97% au-dessus du SMIC.

Nous pensions qu'il y aurait au moins une discussion ou un début de négociation. Aujourd'hui, il n'y en a pas. La partie patronale refuse de négocier.

Nous n'avons d’autre choix que d’accepter cette proposition ou alors de revenir sur leur proposition précédente qui impliquerait la suppression de la prime d'ancienneté... et nous ne souhaitons pas que ce dispositif soit arrêté car nous savons qu'il permet, chaque année, à un certain nombre de collaborateurs de la branche d'avoir une augmentation, même si elle est minime
 ».

Les discussions vont-elles se poursuivre cet été ?

En effet, selon les représentants syndicaux avec lesquels nous avons échangé, le président de la CPPNI a été clair : l'offre proposée n'est pas négociable, a-t-il confirmé par deux fois.

Interrogé par nos soins à propos d'une éventuelle réouverture des négociations lors de la prochaine réunion prévue le 27 juin, nous n'avons pas obtenu de réponse de la part de Morgan Butty.

« Aucune organisation syndicale ne s'avouera vaincue si rapidement et elles reviendront certainement à la charge pour débloquer la situation. Du moins ce sera la position de la CFTC, indique Ophélia Dufort Kleinprinz pour le syndicat.

En effet, cette proposition patronale effondre encore davantage les écarts entre les groupes A, B et C. Par exemple, l'écart entre les groupes B et C est de 2,3% au 1er mai, là il va être de 0,9%. Tout comme entre le A et le B !

Et la perspective probable d'une nouvelle augmentation du SMIC d'ici la fin de l'année obligerait la Branche à recommencer les discussions - en tous cas la délégation CFTC en ferait la demande le cas échéant. 

Donc soit la porte se referme sur un refus de négocier des organisations patronales dès la réunion de juin pour se rouvrir à la prochaine revalorisation du SMIC, soit les discussions se poursuivent cet été
 », ajoute-t-elle.

Formation et prévoyance, au cœur des négociations

Avec une inflation qui semble s'installer dans la durée, doit-on alors s'attendre à une réouverture des NAO trois fois par an ?

La perspective semble bien fastidieuse, d'autant plus que d'autres leviers destinés à favoriser l'attractivité des métiers du tourisme méritent également d'être travaillés et négociés lors des réunions de la CPPNI.

A commencer par la formation, pour laquelle un groupe de travail dédié revoit actuellement le texte de l'accord de branche, obsolète juridiquement, avec l'aide de l'OPCO. « La commission emploi et formation de la branche va faire des propositions pour enrichir ce texte, qui sera une base juridique de rappel à la loi », explique Ophélia Dufort. Puis le nouvel accord de branche reviendra à la CPPNI pour la négociation finale et une éventuelle signature.

Autre négociation en cours : la mise en place d'un régime de branche sur la prévoyance pour les non cadres, pour laquelle les partenaires sociaux veulent avancer rapidement, avec l'aide d'un cabinet spécialisé. « Nous avons une mutuelle de branche qui n'attire pas énormément les entreprises, donc il va falloir y revenir, probablement l'année prochaine, et comprendre pourquoi nous n'arrivons pas à faire adhérer davantage d'entreprises », indique Ophélia Dufort.

Pour cela, les membres de la Commission souhaitent élaborer un cahier des charges, puis lancer un appel d'offres afin de pouvoir recommander un organisme aux entreprises de la branche, et proposer des garanties minimum pour pallier le manque de la convention collective. « L'idée serait d'harmoniser les garanties au niveau de la branche, afin de permettre aux petites entreprises qui souhaitent y adhérer de bénéficier des mêmes pratiques que les plus grands groupes », explique la représentante CFTC.

Les positions des partenaires sociaux doivent évoluer

Parmi les autres sujets à l'étude, on peut également citer le télétravail, pour lequel un accord de branche est en cours de négociation, ou encore les salariés aidants, thème qui sera à l'ordre du jour de la réunion de juin.

« Nous souhaitons aussi pouvoir travailler au second semestre 2024 sur l'épargne salariale inter entreprises, dès lors que nous aurons un peu de recul sur la façon dont les entreprises se sont saisies du nouvel accord de branche sur l'intéressement, annonce Ophélia Dufort. Nous aimerions pouvoir recommander un organisme ».

On le voit, les partenaires sociaux négocient actuellement sur une multitude de sujets très techniques, qui passionnent peut-être moins que la question des salaires, mais qui sont pourtant indispensables à l'attractivité du métier d'agent de voyages. Sauf que les NAO sont revenues plus tôt que prévu au menu des discussions...

« Si les EDV et le SETO acceptent de mettre les NAO derrière nous en acceptant d'aller un peu plus loin que le simple alignement sur le SMIC, nous pourrons certainement avancer sur ces autres thèmes ! », commente Ophélia Dufort Kleinprinz.

Mais que faire pour que la situation s'améliore ? « Mieux vaudrait essayer de trouver un terrain d'entente, poursuit la représentante CFTC, qui reconnaît que les organisations syndicales ont également leur part de responsabilité dans cette situation.

Nous avons fait le choix à deux reprises de ne pas accepter la proposition des EDV et du SETO, étant donné qu'il s'agissait de la même, donc nous avions les mêmes raisons de la refuser. Il faudrait qu'elle évolue pour être à nouveau négociable ».

La Direction générale du travail pourra-t-elle débloquer la situation ?

Toutefois, en cas de blocage, les organisations syndicales ne cachent pas leur intention de saisir les autorités compétentes.

« Nous réfléchissons effectivement depuis le début de l'année à contacter la Direction générale du Travail (DGT) et le Ministère du Travail, affirme pour la CFTC Ophélia Dufort Kleinprinz.

Leur intervention mettrait la CPPNI en mode « mixte paritaire », ce qui ne serait pas forcément négatif à nos yeux. Nous l'avons déjà expérimenté il y a quelques années.

La position des organisations patronales n'est en effet pas très lisible du point de vue des attentes du Ministère du Travail, vis-à-vis des Branches et des partenaires sociaux
 ».

Dans un tel cas, les réunions de la commission seraient organisées, convoquées et animées par la DGT, un peu comme une tutelle.

Cela impliquerait également la présence systématique d'un représentant du Ministère ou de la DGT, qui ferait office d'arbitre entre les deux parties, bien que - rappelons-le - les réunions actuelles se déroulent avec courtoisie et respect, et laissent place au dialogue social, selon les principaux concernés.

Reste à savoir si cette intervention étatique permettrait enfin de débloquer la situation, à l'heure où le Gouvernement n'a de cesse de rappeler que les différentes branches doivent faire des efforts sur les salaires minima, « un enjeu majeur en matière de pouvoir d'achat et de déroulement de carrière pour les salariés, mais aussi d'attractivité des secteurs concernés ». A ce sujet, les EDV ne cachent pas être régulièrement rappelées à l'ordre par la DGT...

Peut-être que la récente déclaration d'Olivia Grégoire à propos d'un meilleur partage de la valeur au sein des entreprises, prévu dans le projet de loi présenté en conseil des ministres ce mercredi (voir ci-dessous), aidera à aller dans le bon sens...


Anaïs Borios Publié par Anaïs Borios Journaliste - TourMaG.com
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